Vaincre le jour, vaincre la nuit,
Vaincre le temps qui colle à moi,
Tout ce silence, tout ce bruit,
Ma faim, mon destin, mon horrible froid.
Vaincre ce cœur, le mettre à nu,
Écraser ce corps plein de fables
Pour le plonger dans l’inconnu,
Dans l’insensible, dans l’impénétrable.
Briser enfin, jeter au noir
Des égouts ces vieilles idoles,
Convertir la haine en espoir,
En de saintes les mauvaises paroles.
Mais mon temps n’est-il pas perdu ?
Tu m’as pris tout le sang, Paris.
À ton cou je suis ce pendu,
Ce libertaire qui pleure et qui rit.
The Seasons' Canon
Crystal Pite
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Jardines del templo
Paul Klee, 1920
PRINTEMPS
Tu, Rrose Sélavy, hors de ces bornes erres
Dans un printemps en proie aux sueurs de l’amour,
Aux parfums de la rose éclose aux murs des tours,
à la fermentation des eaux et de la terre.
Sanglant, la rose au flanc, le danseur, corps de pierre
Paraît sur le théâtre au milieu des labours.
Un peuple de muets d’aveugles et de sourds
applaudira sa danse et sa mort printanière.
C’est dit. Mais la parole inscrite dans la suie
S’efface au gré des vents sous les doigts de la pluie
Pourtant nous l’entendons et lui obéissons.
Au lavoir où l’eau coule un nuage simule
À la fois le savon, la tempête et recule
l’instant où le soleil fleurira les buissons
SAISONS
Le jour est à sa place et coule à fond de temps,
À moins que l’être monte à travers des espaces
Superposés dans la mémoire et délestant
La cervelle et le cœur de souvenirs tenaces.
Étés, puissants étés, votre nom même passe,
Être et avoir été, passe-temps et PRINTEMPS,
Il passe, il est passé comme une eau jamais lasse,
Sans cicatrices, sans témoins et sans étangs.
Saisons, vous chérissez du moins le grain de blé
Qui doit germer aux jours de dégel et la clé
Pour ouvrir aux départs les portes charretière
Les astres dans le ciel par vous sont rassemblés,
L’an va bientôt finir et des pas accablés
Traînent sur les chemins ramenant aux frontières.
Robert Desnos
1900 -1945
Poulenc
1920
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