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ODE CONTRE L'ESPRIT

Foto del escritor: デイジーデイジー

Je touche aux derniers momens

De mes plus belles années ;

Et déjà de mon PRINTEMPS

Toutes les fleurs sont fanées.

Je regarde, et n’envisage

Pour mon arrière-saison,

Que le malheur d’être sage,

Et l’inutile avantage

De connoître la raison.



Nicolas Lancret


ODE CONTRE L’ESPRIT



Source intarissable d’erreurs,

Poison qui corromps la droiture

Des sentimens de la nature,

Et la vérité de nos cœurs ;

Feu follet, qui brilles pour nuire,

Charme des Mortels insensés,

Esprit, je viens ici détruire

Les autels que l’on t’a dressés.


Et toi, fatale Poésie,

C’est lui, sous un nom spécieux,

Qui nomma Langage des Dieux

Les accès de ta frénésie ;


Lui, dont tu pris l’autorité

D’aller consacrant le mensonge,

Et de traiter de vérité

La vaine illusion d’un songe.


{…}


Mais non, de quelque rime rare,

De pointes, de raffinements,

Tu cherches les vains ornemens

Dont une Coquette se pare ;

Et suivant les égaremens

Où jette une verve insensée,

Tu négliges les sentimens

Pour faire briller la pensée.


Esprit, tu séduis ; on t’admire ;

Mais rarement on t’aimera ;

Ce qui sûrement touchera,

C’est ce que le cœur nous fait dire :

C’est ce langage de nos cœurs

Qui saisit l’âme et qui l’agite ;

Et de faire couler nos pleurs

Tu n’auras jamais le mérite.


Mais sur ces frivoles sujets

Pourquoi s’amuser à se plaindre,

Quand de toi l’on a tout à craindre

Sur de plus importants objets ?

Dans les choses les plus sacrées,

Tu te plais à nous faire voir

Que, plus elles sont révérées,

Et plus y brille ton pouvoir.


{…}


C’est dans ce Livre détestable

Où paroît ta corruption

Qui, d’une douce passion,

A fait un Art abominable ;

Art d’où nous vint en sa fureur

Ce monstre de coquetterie,

Et ce métier faux et trompeur

Qu’on appelle galanterie.


Mais hélas ! insensiblement

Je suis un charme qui m’entraîne ;

Je sens que j’oublierai ma haine,

Si j’écris encore un moment.

Esprit, que je hais et qu’on aime,

Avec douleur je m’aperçoi,

Pour écrire contre toi-même,

Qu’on ne peut se passer de toi !


Guillaume Amfrye de Chaulieu

1639 - 1720


L’Europe Galante

André Campra


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